Journées de la Topographie
du 2 au 4 octobre 2006

Céline Ravier

ÉTUDE  COMPARATIVE  DES  DIFFÉRENTES  MÉTHODES DE MODÉLISATION ARCHITECTURALE 3D  ET ANALYSE DE LA PRÉCISION FINALE DES MODÈLES 3D TEXTU ÉS

Société d’accueil :                      TPLM-3D
PFE présenté par :                    Céline Ravier
Directeur du PFE :                    M. Stéphane Hopp
Correcteurs :                             MM. Pierre Grussenmeyer et Mathieu Koehl

1. Introduction

L'entreprise   TPLM-3D   (ToPographie,   Lasergrammétrie,   Modélisation),   créée   en   2004   par  David Desbuisson et Stéphane Hopp (ENSAIS 1998), emploie un ingénieur géomètre INSA 2005 et  un   technicien   supérieur.   La   lasergrammétrie   étant   une   technique   récente   en   plein   essor,   il   est  important   pour  cette   jeune   équipe   de   se   tenir   au   courant   des  avancées  de   la   recherche   et   de  développer ses propres outils de modélisation. En parallèle à ses activités, la société possède un pôle  R&D   (Recherche   et   Développement)   qui   fait   partie   intégrante   de   l'activité.   Dans   ce   cadre,   elle  accueille régulièrement des stagiaires de filières variées; l'année dernière,Vincent Fabry, maintenant  employé  en tant  qu'ingénieur,  a  mis  en  place,  pendant  son  PFE,  une  méthode  de  modélisation  adaptée à l'architecture. Cette année, mon projet présente deux objectifs, le premier consiste, à partir  d'un inventaire des différentes méthodes de modélisation, à compléter la méthode de modélisation  architecturale appliquée jusqu'à présent. La seconde partie aura pour but d'étudier la précision finale  des modèles 3D texturés.

2. Inventaire des différentes méthodes de modélisation

Suivant le type d'objet à modéliser, différentes méthodes de modélisation sont applicables. Il  est donc important d'associer à chaque objet la méthode la mieux adaptée, c'est à dire, celle qui  apporte le meilleur compromis entre représentation fidèle et logique, précision et rapidité d'exécution.

2.1. Maillage polygonal:
Il s'agit d'une triangulation du nuage de points en vue d'obtenir un modèle polygonal.  Cette méthode est très utilisée pour la modélisation d'objets complexes (statues, bas- reliefs) pour lesquels aucune autre solution ne convient. Elle génère des modèles  fidèles à la réalité mais assez lourds.

2.2. Cartes de profondeur:
Cette   technique   est   adaptée   à   la   modélisation   de   bas-reliefs.   Contrairement   au  maillage polygonal  qui est  une procédure automatique, le  principe  des cartes de  profondeur a pour objectif d'extraire de la forme existante une intention de conception.  Elle part du principe que le bas-relief est construit sur un plan de référence; une carte  de profondeur est construite par la traduction de la distance qui sépare chaque point  du nuage de ce plan selon une échelle de couleur. Une surface maillée régulière est  ensuite déformée à partir de cette carte de couleur.

2.3. Modélisation à l'aide de primitives géométriques:
Ce type d'outil est proposé par la majorité des logiciels de modélisation destinés  principalement au domaine industriel. Il permet de calculer, le meilleur plan, cylindre,  boîte ou sphère par rapport à une portion de nuage de points sélectionnée. Cette  méthode est fidèle à la réalité et très rapide car de plus en plus automatisée.

2.4. Modélisation à partir d'un ensemble de points pertinents:

a)  Construction d'un modèle filaire, base de la modélisation:

Extraction des arêtes et des lignes caractéristiques de l'objet.

b)  Extrusion d'un profil selon une trajectoire:

Beaucoup   d'objets   de   l'architecture   sont   à   profil   constant,   cette   méthode   permet   une  modélisation très rapide.

c)  Interpolation à partir de plusieurs génératrices:

Cet outil permet de joindre deux génératrices (polylignes) par l'intermédiaire d'un maillage  intelligent. L'interpolation entre les génératrices étant linéaire, selon une courbe de Bezier ou lissée.

3. Compléments à la méthode mise en oeuvre par Vincent Fabry

La sauvegarde du patrimoine est un enjeu de taille pour les architectes et archéologues; dans 
ce cadre, la lasergrammétrie permet de révolutionner les relevés de monuments. Les systèmes laser  ont beaucoup évolué ces dernières années, les levés sont plus précis et plus complets en un temps  réduit.   Les   architectes,   archéologues   et   conservateurs   sont   donc   amenés   à   faire   appel   à   cette  technique. Si le levé est plus rapide, le traitement au bureau reste une phase assez complexe qu'il est  nécessaire d'améliorer. Avant tout, il est important de connaître les exigences des clients.

3.1. Attentes des clients
•     Décomposition de l'objet en éléments simples faisant référence aux traités d'architecture.
➔   chaque sous-objet correspond à un terme du vocabulaire architectural ➔   une étude des moulures permet la construction des éléments profilés
•     Modèle TQS (Tel Que Saisi) de l'objet et non TQC (Tel Que Construit).
➔   Modèle TQC: représentation idéale de l'objet tel qu'il était juste après sa construction.
➔   Modèle TQS: représentation la plus fidèle de l'objet, elle fait apparaître l'effet de l'érosion
sur la pierre et les défauts mineurs dûs au temps.
•     Un produit financièrement attractif
➔   la plupart des chantiers dans le domaine de l'architecture et de l'archéologie sont financés
par des fonds publics peu conséquents.

3.2. Présentation de la méthode
La méthode de Vincent Fabry consiste à mailler les zones complexes sous 3D Reshaper; le  reste du nuage de points est traité sous Autocad complété par l'applicatif Cloudworx de Leica qui  permet l'affichage du nuage de points dans l'environnement DAO. On y extrait un modèle filaire de  l'objet   comportant   essentiellement   des   arêtes,   des   profils,   axes   de   révolution   et   trajectoires  d'extrusion. On réalise ensuite le modèle proprement dit sous 3ds max (Autodesk), les éléments  profilés sont construits par extrusion ou révolution, les formes simples sont construites à partir de  formes géométriques qui peuvent être ensuite déformées pour « coller » au maximum à la réalité. Le  maillage des zones complexes est importé dans 3ds max pour compléter le modèle. Pour obtenir une  représentation type réalité visuelle, le modèle est texturé à partir de photographies de l'objet, orientées  puis projetées.

3.3. Amélioration de la méthode
Afin de satisfaire au mieux les attentes du client, la méthode mise en place par Vincent Fabry  va être complétée. Un levé sur le Temple d'Auguste et Livie à Vienne (38) servira de base à la  recherche de nouveaux outils de modélisation. Il s'agit d'un temple romain datant des années 20-10  avant  JC.  Utilisé comme église,  musée  puis  bibliothèque,  il  a ensuite  été  rénové  en  1850  pour  supprimer les transformations qu'il avait subi.


Fig  3.3.1: Décomposition du temple en éléments simples référencés à des termes du vocabulaire  architectural


Toute modélisation nécessite une décomposition de l'objet en éléments simples. En ce qui  concerne les bâtiments du patrimoine architectural, cette décomposition doit respecter les  traités   de   l'architecture.   Une   étude   des   planches   de   Rey   E.   et   Vietty   E.   concernant  l'architecture du temple a permis sa décomposition.         Étude de l'architecture de l'objet à modéliser:
✗    Passage du modèle TQC au modèle TQS:        
La méthode de modélisation utilisée jusqu'à présent ne permet pas la représentation des  zones détruites assez nombreuses sur des monuments aussi anciens. Les murs construits  entre les colonnes lors de la transformation en église ont été supprimés pendant la rénovation  du temple en 1850. Ceci a causé de nombreuses dégradations sur le fût des colonnes. La  modélisation de ces zones détruites semble essentielle à plusieurs niveaux:
•     pour le rendu, les textures ne sont pas toujours suffisantes
•     pour la qualité du texturage, afin d'éviter que des zones de ciel, par exemple, viennent  texturer des colonnes.
enfin pour une étude de rénovation afin de situer les parties dégradées.
La solution consiste à créer un moule que l'on va soustraire, par opération booléenne, à la  colonne au niveau des zones détruites.          •

Fig 3.3.2: Passage du modèle TQC au modèle TQS par opération booléenne

4. Etude de la précision finale du modèle 3D texturé

En tant que géomètre il est important de connaître la précision que l'on peut atteindre sur un  monument tel que le Temple d'Auguste et Livie. D'autre part, l'étude mise en place sur le temple  pourra tout à fait être appliquée sur les prochains modèles. Une première analyse a été réalisée avec  l'outil Compare/Inspect de 3D Reshaper qui effectue une cartographie 3D des écarts entre le modèle  et le nuage de points. Les écarts sont mis en évidence selon leur importance par une échelle de  couleurs. On peut de cette façon connaître le pourcentage de points pour lesquels l'écart est compris  entre ±d (d est définie par l'utilisateur).

Fig 3.3.3:  Cartographie des écarts pour la Cella, partie intérieure du temple


Un contrôle du modèle, par comparaison de points positionnés sur le modèle avec ces mêmes  points mesurés sur le terrain, a également été réalisé. Afin de disposer d'un échantillon de points  suffisamment représentatif, nous avons levé environ 200 points répartis de façon homogène sur le  modèle. Le traitement des observations a abouti à des écarts type en X, Y, Z, et sur la distance entre  le point du modèle et le point mesuré sur le terrain. Les coordonnées X et Z représentent la largeur et  la hauteur sur chaque façade du temple, Y correspond à la profondeur.
dX=±1,4cm  ,dY=±1,6cm  ,dZ=±1,3cm  ,D=±2,5cm

5. Conclusion

Ce projet a permis, tout en réalisant la modélisation 3D texturée du Temple d'Auguste et Livie,  d'améliorer   la   méthode   de   modélisation.   Les   chantiers   de   modélisation   3D   dans   le   domaine  architectural seront désormais structurés de cette façon:

  • une étude - préalable au levé - des traités d'architecture permettra la décomposition de l'objet  en éléments simples. Elle pourra éventuellement être prise en compte lors du levé (scan fin  de zones importantes) et facilitera ainsi le travail de modélisation.
  • la représentation des zones abîmées sera effectuée selon les besoins du client. Les zones  maillées augmentent la « lourdeur » du fichier, la navigation dans le modèle est alors plus  difficile.
  • le contrôle du modèle 3D avec l'outil Compare/Inspect sera effectué tout au long du processus  de modélisation. Le contrôle par relevé sur site a permis d'établir un ordre de grandeur de la  précision que l'on peut atteindre sur un monument de ce genre. Cette étape est pour l'instant  assez   fastidieuse   mais   quelques   améliorations   pourraient   rendre   son   application  systématique.
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