Journées de la Topographie
du 2 au 4 octobre 2006

David Gayraud

DEVELOPPEMENT DUNE CHAINE PHOTOGRAMMETRIQUE POUR LETUDE
SPECTROPHOTOMETRIQUE EXPERIMENTALE DANALOGUES DE SURFACES PLANETAIRES  REALISE POUR LE LABORATOIRE DE DYNAMIQUE TERRESTRE ET PLANETAIRE A L’OBSERVATOIRE MIDI-PYRENEES

Société d’accueil : Laboratoire « Dynamique Terrestre et Planétaire »      Unité Mixte de Recherche 5562
Observatoire Midi-Pyrénées

PFE présenté par :                   David Gayraud
Directeurs du PFE :                  Mr Patrick Pinet & Mr David Baratoux
Correcteurs :                             Mme Tania Landes & Mr Eddie Smigiel 

Introduction

Mon projet de fin d’étude s’effectue au sein d’une unité du Centre National pour la Recherche  Scientifique (CNRS), l’Unité Mixte de Recherche UMR5562 ; laboratoire de Dynamique Terrestre et  Planétaire situé à l’Observatoire Midi-Pyrénées.
De  manière  générale,  l’étude  photométrique  à  partir  de  données  hyperspectrales  prend  progressivement  de  l’importance  dans  l’exploration  planétaire.  Elle  permet  l’étude  minéralogique  et  pétrographique des sols à partir de modèles de réflec tance évolués. Les données expérimentales sont  donc  essentielles  au  développement  et  à  la  validation  de  ces  modèles.  L’imageur  Spectral  pour  l’Exploration Planétaire (ISEP) a été créé en réponse à ce besoin et permet ainsi de caractériser les  propriétés spectrales et photométriques d’analogues de surfaces planétaires.  
Afin    de    continuer    le    développement    de    ces    études    photométriques,    un    module  photogrammétrique  est  nécessaire  afin  de  connaître  les  angles  pour  des  topographies  complexes.  Cette  chaîne  de  traitement  doit  permettre  de  créer  des  ortho-images,  des  modèles  numériques  de  terrain (MNT) et la création de cartes de pentes. La chaine photogrammétrique sera donc un outil au  service  de  l’étude  photométrique.  En  effet,  une  connaissance  des  pentes  d’un  terrain  à  différentes  échelles   ainsi   qu’une   précise   superposition   d’images   ortho-rectifiées   provenant   de   géométries  différentes  sont  nécessaires  à  l’inversion  de  données  multi-angulaires  pour  la  détermination  des  paramètres photométriques des matériaux granulaires utilisés.
Mon  projet  est  donc  de  définir,  développer   et  tester  cette  chaîne  photogrammétrique.  L’application se doit d’être adaptable et suit les caractéristiques de l’imageur, son fonctionnement doit  être aussi simple que possible et les différents modules de la chaîne doivent être indépendants pour   pouvoir être améliorés ou redéfinis suivant l’évolution des besoins des utilisateurs. Les modules   composant cette chaîne seront testés, aussi bien dans leurs fonctionnements que dans leurs limites.

1.  Présentation  

1.1. L’imageur Spectral pour l’Exploration Planétaire (ISEP) 

Cet  instrument  permet  d’obtenir  une  image  hyperspectrale  de  réflectance  à  19  bandes,  les  longueurs   d’onde   allant   du   proche   ultraviolet   au proche   infrarouge.   Les   conditions   angulaires  d’émergence  (position  du  capteur,  la  caméra  dans  notre  cas)  et  d’incidence  (position  de  la  source  lumineuse,  le  soleil  dans  notre  cas)  ont  pour  but  de  simuler  les  conditions  les  plus  fréquemment  rencontrées par les sondes spatiales. Elles varient respectivement de -70° à +70° et de 0° à 50°. Les  variations  d’incidence  sont  permises  par  un  jeu  de miroirs  qui  éclaire  l’échantillon  d’un  faisceau  de  lumière solaire. A l’origine, les images produites n’étaient que dans le plan principal ( avec un angle  d’azimut  de  0  ou  180°)  cependant  une  source  de  lumière  artificielle  a  été  ajoutée  permettant  des  observations   sous   tout   azimut.   Les   images   du   cratère   à   partir   desquelles   l’application   a   été développée sont toutes comprises dans le plan principal. Les images créées par le CCD possèdent une taille de 1242*1152 pixels. Un polariseur est en cours d’étude afin d’être prochainement incorporé  à l’instrument.

1.1.La photométrie

Le modèle photométrique utilisé est le modèle de  Hapke, l’équation du modèle est fonction de 6  paramètres  et  3  angles,  les  angles  d’émergence,  d’incidence  et  de  phase.  Les  6  paramètres  caractérisent  chacun  un  aspect  de  la  réflexion  et  permettent  ainsi  une  meilleure  connaissance  de  l’objet  éclairé  par  inversion  du  modèle.  Les  paramètres  de  Hapke  donnent  des  informations  à  des  échelles  sub-pixellaires  à  partir  de  données  angulaires  déduites  de  l’information  topographique  impliquant  plusieurs  pixels.  Ainsi,  améliorer  la  détermination  de  ces  angles  permettra  une  meilleure  connaissance de ces paramètres et de leurs évolutions.

2.  La structure de la chaîne photogrammétrique

La détermination de l’organisation des processus a été la base du développement de la chaîne. 
Tout d’abord, elle comporte une partie qui traite les images indépendamment afin de déterminer leurs  orientations,  c’est-à-dire  les  6  paramètres  (3  rotations  et  3  distances)  caractérisant  pour  chaque  configuration   l’orientation   du   capteur   CCD.   Une   projection   verticale   sans   tenir   compte   de   la  topographie est ensuite effectuée (création de « fausses » ortho-images) car elle permet de faciliter la  corrélation des images entre elles qui est l’étape suivante. En effet, la corrélation permet sur chaque  image de faire correspondre les coordonnées des mêmes points : de déterminer les homologues. Les  homologues identifiés, il faut par la suite ramener  les images dans leurs configurations initiales afin  d’avoir les coordonnées des homologues sur les images de départ. A partir de cette étape, la création  du   Modèle   Numérique   de   Terrain   (MNT)   est   possible   par   triangulation   du   couple   d’images  stéréoscopique. Une fois ce MNT créé, les étapes  suivantes permettent d’obtenir une grille régulière  des coordonnées Z (altitude) par interpolation, d’effectuer cette fois une véritable projection verticale  en tenant compte de la topographie et donc d’avoir de vraies ortho-images, mais également de créer  des cartes de pentes connaissant les coordonnées X, Y, Z au sol pour chaque pixel. 
Pour effectuer ces transformations, la mise en place de 3 repères sont nécessaires et les formules  de passages permettant les correspondances entre chaque ont été établies. Un premier repère est le  repère « ENVI », d’unité le pixel et de centre le bord haut gauche des images, le second appelé le  repère image est centré sur l’image et d’unité le millimètre, quant au dernier il est situé sur la cible au  sol et a également pour unité le millimètre.

2.1.  Les paramètres d’orientation des prises de vues

Les  6  paramètres  d’orientation  des  prises  de  vues  sont  calculés  à  partir  de  points  de  calage  connus  en  coordonnées  objet  (X,Y,Z)  et  situés  sur  la  cible.  A  partir  de  ces  coordonnées  et  des  formules  de  transformation  de  coordonnées  entre  le  repère  image  et  le  repère  objet  les  moindres  carrés  sont  appliqués  afin  de  calculer  les  3  angles  de  rotation  et  les  3  distances  définissant  l’orientation des images dans l’espace. 

2.2. La création des ortho-images

Les  ortho-images  sont  de  tailles  paramétrables  et  réalisables  au  travers  de  5  étapes  de  transformation de coordonnées afin de définir à quel  endroit de l ‘image originelle il faut prélever le  pixel qui remplira l’ortho-image. Les ortho-images créées ont toutes des tailles de 300*1300 pixels,  légèrement supérieures aux tailles initiales afin de ne pas perdre d’information. La résolution spatiale  des ortho-images est de 192µm.

2.3.La corrélation

La corrélation a pour but d’identifier les points homologues sur un couple stéréoscopique. La  méthode de Fourier a été la technique retenue pour cette corrélation. L’algorithme est divisé en trois  parties ; tout d’abord la corrélation est appliquée à une imagette centrale de taille paramétrable afin de  déterminer  un décalage approximatif global sur  l’ensemble de l’image. Dans un second temps, une  imagette, plus petite, va balayer l’image avec unpas également paramétrable afin de calculer pour chaque pixel situé au centre de cette dernière son décalage propre. La dernière étape correspond à la  précédente  réitérée  avec  des  tailles  d’imagettes  encore  plus  petite  à  titre  de  vérification  de  la  convergence.  Les  pixels  dont  les  décalages  n’ont pas  été  calculés  en  raison  du  pas  contrôlant  le  déplacement  des  imagettes  se  voient  attribuer  une  valeur  de  décalage  par  interpolation.  Par  ce  procédé, chaque pixel possède son décalage prop re provenant de calculs effectués à des échelles  différentes dans l’image.

 

2.4.La triangulation

Une  fois  les  points  homologues  identifiés  au  sein  du  couple  stéréoscopique,  la  triangulation  permet  de  calculer  les  coordonnées  objet  de  ces  points  par  transformation  de  coordonnées  et  en  utilisant  les  moindres  carrés.  Le  principe  est  de  calculer  le  point  au  sol  de  coordonnées  (X,Y,Z)  permettant de s’approcher au mieux des coordonnées des points homologues sur les 2 images.

2.5. Les cartes de pentes 

Un des objectifs principaux de cette application est la création de cartes de pentes afin d’établir  avec une meilleure précision les angles d’émergence et d’incidence. La méthode est de créer un plan  dans une fenêtre de taille définie par l’utilisateur (déterminant la résolution de la carte) s’ajustant au  mieux à l’ensemble des points présents. Une fois les paramètres du plan connus, l’angle de la droite  de plus grande pente avec l’horizontale détermine l’angle de pente attribué.

3.  Résultats et analyse 

3.1. Etude des paramètres d’orientation

Les  images  utilisées  ne  disposent  malheureusement  ni  de  points  de  calage  ni  de  points  remarquables  pouvant  être  utilisés  comme  tels.  La  méthode  a  donc  été  adapté e  et  les  différentes  configurations ont été calées à partir de l’image nadir. Neuf points sur cette image ont été définis et une  fois leurs coordonnées objet calculées, ils ont été  considérés comme étant des points de calage. Ainsi  l’image  nadir  a  été  prise  comme  référence.  Ces  points  étant  visibles  sur  toutes  les  images,  le  processus  initialement  prévu  a  pu  être  utilisé  avec  ces  « nouveaux »  points  de  calage.  Les  angles  d’émergence ainsi calculés pour les configurations annoncées par l’imageur comme valant 20°, 40° et  60° sont de 20.220°, 30.829°, 60.043°. Ils correspondent donc à ceux définis à l’origine à ±0.22° près.

3.2. Etude des possibilités de l’algorithme de corrélation.

Le décalage approximatif global défini par la première étape de la corrélation a été testé pour des  tailles d’imagettes allant de 200*200 pixels à 800*800 pixels suivant les 6 configurations de couples  stéréoscopiques possibles créées à partir des 4 im ages à disposition. Ces tests nous révèlent qu’une  valeur stable du décalage global des images entre elles est calculée à partir de tailles d’imagettes de  400*400 pixels pour les couples 0°/20° et 20°/40° et de 500*500 pixels pour le couple 0°/40°. Les 3  couples   d’images   créés   à   partir   de   l’ortho-image   prise   originellement   sous   émergence   60°  n’obtiennent de valeurs stables pour aucune taille. Nous ne considérerons pas cette image dans la  suite de l’application.
L’échelle d’analyse des fenêtres de corrélationest conditionnée par la distribution spatiale des  structures de l’image (morphologie, contraste d’albédo,topographie). En l’absence de distorsions, le  décalage  obtenu  à  partir  de  la  corrélation  globale  devrait  être  le  même  quelle  que  soit  la  région  de  l’image considérée pour une fenêtre d’analyse donnée (par exemple de taille 500*500 pixels appelé  échelle 1 : « EC1 »). Dans notre cas réel, l’analyse des décalages pour une fenêtre de taille donnée  placée dans les coins de l’image au lieu du centre montre une variation de ces valeurs de quelques  pixels de façon anti-conjuguée (entre le coin haut  droit et le coin bas gauche). Afin d’optimiser ces  corrections différentielles, une échelle spatiale régionale appropriée (appelé « EC2 ») est utilisée pour  la fenêtre de corrélation glissante d’un pas commensurable avec l’échelle locale la plus fine ; un pas  de 2. Une analyse de la corrélation à une troisième échelle plus fine (appelée « EC3 ») est également  appliquée afin de s’assurer que les résultats ont bien convergé à l’échelle EC2.  
De  nombreuses  tailles  d’imagettes  glissantes  ont  été  testées,  les  tailles  les  plus  adéquates  sont celles de 81*81 et 101*101 pixels pour les couples 0°/20° et 20°/40° et 151*151 pixels pour le  couple 0°/40°. De manière générale, l’algorithme de corrélation a des difficultés sur les zones où la  topographie varie avec un gradient local important, soit le mur intérieur du cratère. Le reste de la cible ainsi que les éjectas sont correctement décelés. Quant aux valeurs de décalage calculées à l’échelle  EC3, elles se révèlent être toutes identiques à celle s de l’échelle EC2, ce qui signifie que la corrélation  a pris en compte (à l’échelle EC2) non seulement les variations régionales mais aussi locales dans la  détermination des décalages différentiels.

3.3. Les modèles numériques de terrain

Les difficultés rencontrées par la corrélation au niveau du rempart du cratère se traduisent par des  discontinuités dans le MNT. Les imagettes de 101*101 pixels permettent la meilleure modélisation de  l’intérieur du cratère, de profondeur 25mm, pour les couples 0°/20° et 20°/40°. Les altitudes créées  par la triangulation et visualisées sur le MNT sont généralement concordantes, une partie reste non  modélisée, le rempart intérieur du cratère présentant des pentes de 30° d’inclinaison.

3.4. Les cartes de pente

Les tailles de grains composant la cible varient entre 20µm et 2mm, ce qui  signifie que l’échelle  spatiale d’échantillonnage (200µm) se situe dans la distribution de taille. Les études photométriques  actuelles se basent sur des fenêtres de 3*3 pixels  soit environ 0.6*0.6mm. Les grains conditionnent  les angles de pente pour des fenêtres de faibles tailles et ainsi créent des hautes fréquences dans les  variations des angles qui participent davantage de la rugosité texturale de la cible que des pentes. Il  faut ainsi évaluer la résolution spatiale de la carte à créer afin de répondre au mieux au besoin de  l’étude  photométrique.  Six  résolutions  ont  été  testées
(de  7*7  pixels  à  51*51  pixels)  sur  deux  profils  caractéristiques de la cible : au travers des éjectas et au travers du cratère. La résolution choisie doit  être applicable à toute l’image.  
La résolution spatiale des cartes de pentes  pouvant être utilisée par l’étude photométrique se  situe  entre  21*21  et  31*31  pixels  soit  représentant  des  fenêtres  de  2.885mm  et  4.038mm.  L’étude  photogrammétrique   détermine   donc   les   angles   nécessaires   à   l’étude   photométrique   sur   des  groupements  de  pixels  de  7  à  10  fois  plus  grands  que  ceux  utilisés  par  le  modèle  de  Hapke  actuellement.

CONCLUSION

La  chaîne  photogrammétrique  répondant  au besoin  de  l’étude  photométrique  a  donc  été  conçue  et  développée.  La  structure  de  cette  chaîne  est  solide  et  permet  de  répondre  aux  attentes  demandées, cependant certaines étapes doivent encore être améliorées pour complètement remplir  les objectifs. 
Tout d’abord, les paramètres d’orientation desprises de  vues doivent être déterminés par des  points de calage sur la cible ainsi ils seront déterminés avec une précision connue ; ceci permettra de  meilleures projections et limitera les difficultés rencontrées avec la corrélation. De plus, actuellement  les configurations à disposition sont toutes du même côté de la normale à la cible avec une incidence  sous  30°  située  de  l’autre  côté.  Ces  configurations  ne  sont  pas  idéales  pour  un  couple  d’images  stéréoscopiques  où  chaque  image  devrait  être  prise  de  part  et  d’autre  de  la  normale  avec  une  incidence relativement faible.     
En  résumé,  je  pense  qu’avant  de  remplacer  le  module  de  corrélation  présent  par  un  corrélateur plus performant, deux étapes sont à réal iser. Tout d’abord une uniformisation des boîtes  contenant les cibles avec des points de calage définis et de précision connue, puis une augmentation  du nombre des configurations angulaires des prises de vues. Une méthode rigoureuse dans les prises  de   mesures   pourra   ainsi   être   mise   en   place   car   l’on   se   rend   bien   compte   que   l’étude  photogrammétrique  a  des  besoins  de  configurations  angulaires  d’images  différentes  de  l’étude  photométrique et qu’ils doivent être incorporés dans les futures campagnes de mesures.
En tout cas même si les objectifs fixés ne sont pas complètement atteints, les résultats  obtenus sont tout de même cohérents sur une grande partie de la cible, les limites de la chaîne de  traitement ont été évaluées et les  axes d’évolution sont désormaisconnus afin de rendre cette chaîne  de traitement aussi performante que possible.
D’un point de vue personnel, travailler au sein de cette unité de recherche m’a énormément  enrichi, que ce soit par les méthodes de raisonnement, la liberté de choix dans le travail, les réflexions  engendrées par les notions découvertes et par les outils utilisés.  

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