Journées de la Topographie
du 2 au 4 octobre 2006

Flavien VIGUIER

S U I V I   D E S   M O U V E M E N T S   D E S   O U V R A G E S  
E N   T E R R E   D E   L A   S N C F   P A R   L A S E R G R A M M E T R I E  

Société d’accueil :                      SNCF
PFE présenté par :                    Flavien VIGUIER
Directeurs du PFE :                   P. HALLE / J.C. DANJON
Correcteurs :                             P. GRUSSENMEYER 
J. LEDIG

1.    Introduction

Dans le but d’améliorer la qualité des auscultations des mouvements des ouvrages en terre, 
la   Division   de   Topographie   de   la   SNCF   a   décidé   de   ester   les   capacités   d’une   nouvelle  technologie : la  lasergrammétrie. En  effet, après analyse des méthodes utilisées jusqu’à ce jour  (Suivis  par  nivellement,  par  tachéométrie  et  par  GPS),  nous  avons  constaté  qu’il  ne  nous  était  possible de quantifier que des mouvements, ponctuels et localisés, caractéristiques des désordres  géologiques étudiés. 
L’utilisation d’un laser scanner, instrument employé lors de levers lasergrammétriques, qui  est capable de mesurer quasiment en temps réel un ensemble de points appelé nuage, pourrait  contourner cette lacune. Chaque opération ainsi réalisée nous permettra d’obtenir un modèle en 3  dimensions du terrain qui, après comparaison avec les opérations précédentes, nous indiquera les  zones sujettes à des mouvements. Nous pourrons alors quantifier la totalité des déplacements.

2.    Les objectifs

Réaliser  l’inventaire  des  techniques  d’auscultations  d’ouvrages  en  terre  actuelles  et  analyser leurs précisions. 
Tester   différents   lasers   scanners   (Leica   HDS   3000  et   Trimble   GX)   au   cours  d’opérations de suivis de mouvements.
Etudier les capacités des logiciels de traitements et les précisions instrumentales
Etudier les documents livrables à partir de données lasergrammétriques

3.    Les techniques actuelles  d’auscultation

La  Division  de  Topographie  de  la  SNCF  est  actuellement  chargée  d’un  grand  nombre  de  suivis   de   mouvements   d’ouvrages   en   terre   situés   en  milieu   ferroviaire.   Afin   de   contrôler   les  déplacements,  le service  met  en  place  un  réseau  de points  qui  est  constitué  de  deux  niveaux  distincts : un réseau de références stables (situéhors des zones à risques) et un réseau de stations et  de repères de contrôle positionné au cœur des parties de l’ouvrage sujettes à mouvements.
Pour  réaliser  ces  auscultations,  la  Division  utilise  différentes  méthodes  de  levers  qui  sont  présentées  ci-dessous.  Le  choix  de  l’une  ou  l’autre  technique  de  lever  est  bien  entendu  réalisé  en  fonction de la configuration du terrain et de l’amplitude des mouvements à détecter. Les déplacements  à quantifier sont la plupart du temps de l’ordre de 2 à 3 centimètres par an.
Suivis altimétriques
Les  mesures  altimétriques  sont  mises  en  place  lors de  suivis  de  mouvements  de  déblais  ou  de  remblais  ferroviaires.  Ainsi,   afin   d’assurer   la   qualité   des   mesures,   les   opérations  d’auscultations altimétriques sont effectuées à l’aide de niveaux  numériques de type Dini 12 ou Leica NA 3003 (cf. figure 1 et 2)  couplés   à   des   mires   en   Invar.   Nous   réalisons   alors  des  cheminements  doubles  de  type  « Cholesky ».  D’autre   part,  ces cheminements font l’objet d’un nivellement aller-retour. Une fois la méthode de mesure définie, nous  avons étudié les capacités de la technique. L’étude théorique nous fournit une précision de ± 0.2 mm,  néanmoins après prise en compte des contraintes de l’environnement ferroviaire (Passage de trains,  effet de souffle…) nous fournissons les résultats à ± 1 mm.
Les   mesures   de   nivellement   sont,   la   plupart   du   temps,   couplées   à   des   mesures  planimétriques  (que  ce  soit  par  GPS  ou  par  tachéométrie  classique).  En  effet,  il  est  souvent  indispensable  de  déterminer  l’ensemble  des  mouvements  subis  par  l’ouvrage.  La  seule  mesure  altimétrique n’est alors pas suffisante.
Suivis planimétriques (tachéométriques)
Les   mesures   planimétriques   sont   effectuées   lorsqu’il   est  nécessaire   de   déterminer   les   mouvements   transversaux   voire  longitudinaux auxquels sont soumis les différents ouvrages en terre.  Ces  mesures  sont  indispensables  lorsque  l’ouvrage  est  implanté  dans  une  zone  très  instable mais  peuvent  aussi  être   effectuées  en  présence d’ouvrages de taille importante (d’une longueur supérieure  à 100 mètres).
La plupart  des sites suivis par  la  SNCF étant  inaccessibles  nous  auscultons  les  points  de  contrôle,  par  mesures  angulaires  uniquement  (Intersections  spatiales).  L’ensemble  des  mesures  est  bien   évidemment   effectué   par   l’intermédiaire   de   la méthode   du                     centrage forcé. Pour cela nous utilisons des instruments de type Leica TCA 2003 ou Trimble 5601 (cf.  figure  3).  Après  étude  et  prise  en  compte  de  la  plupart  des  erreurs  de mesures  (et  des  contraintes  ferroviaires) nous estimons la précision de ces mesures à ± 3 mm.
Suivis planimétriques et altimétriques par GPS
Les suivis de mouvements d’ouvrages par GPS sont mis en place lorsque nous sommes en  présence d’ouvrages en terre de superficie très importante (Longueur supérieure à 500 m et surface  supérieure  à  20 000  m²)  sujets  à  des  mouvements  de grande  ampleur  (Déplacements  de  plusieurs  centimètres par an).
Chaque point, mesuré en mode G.P.S. Temps Réel (à l’aide d’instruments Leica System 300,  500 ou 1200) est stationné deux fois à deux moments distincts. Cette double détermination, avec des  satellites différents, permet de garantir la fiabilité des résultats. De cette manière, nous obtenonsune  précision  de  ±  1  cm  en  planimétrie  et  ±  2  à  3  cm  en  altimétrie  (précisions  basées  sur  des  études  empiriques).
Nous  pouvons  constater  ici  que  les  fluctuations  observées  ne  sont  que  ponctuelles  dans  l’espace. Cette information ponctuelle est la principale voire la seule limite des techniques actuelles.  Ainsi,  afin  de  contourner  ce  problème  nous  avons  testé  les  capacités  des  scanners  lasers,  qui  permettent la mesure de la totalité de l’objet à ausculter.

4.    Présentation du laser scanner

On  appelle  « laser  scanner »  un  type  d’instrument  q ui  mesure  automatiquement et de manière quasi immédiate un ensemble de points  (appelé nuage) connu dans un repère X, Y, Z. Ces instruments à mesure  active (car ils émettent leur propre rayon laser et ne nécessitent aucun  éclairage  extérieur),  combinent  la  mesure  de  distances  à  celle  de  la rotation de deux miroirs oscillants (l’un autour de l’axe  horizontal   et   l’autre   autour   de   l’axe   vertical)   pour déterminer  la  position  planimétrique  et  altimétrique  de  chaque   point   mesuré   (cf.   figure   4).   

Le   système enregistre  également  l’intensité  du  signal  reçu  ce  qui   permet   de   distinguer   les   objets   par   leur  réflectivité.                                                                          

Après analyse des capacités des différents lasersscanners présents sur le  marché (scanner laser à triangulation, à mesure de phase et à mesure de temps de  vol), nous nous sommes orientés vers le Leica HDS 3000 et le Trimble GX qui sont

deux scanners à temps de vol qui permettent de réaliser des mesures jusqu’à des distances d’environ  200 mètres. Ces deux instruments sont présentés dans la figure 5.
Contrairement  aux  instruments  de  topographie  classique,  comme  les  stations  totales  par  exemple,  la  qualité  des  lasers  scanners  n’est  pas  simplement  définie  par  la  précision  des  mesures  angulaires et de distances. En effet, ces instruments se caractérisent également par leur résolution,la  taille du spot laser et l’intervalle minimum angulaire.
Par ailleurs, d’autres paramètres, indépendants de l’instrument utilisé, tels que la réflectivité  de  l’objet  scanné  et  les  conditions  environnementales  agissent  directement  sur  la  précision  des  mesures.

5.    Le traitement des données

Le   traitement   des   données   représente   la   majeure   et  la   plus   difficile   partie   de   la  lasergrammétrie car le projeteur doit acquérir une nouvelle façon de penser. En effet, la réflexion ne  s’effectue  plus  à  partir  d’un  semis  de  points  en  deux  dimensions  mais  se  base  sur  un  semis  de  plusieurs millions de points dessinés en trois dimensions.
Afin   de   connaître   les   capacités   des   outils   fournis par   les  constructeurs,    nous    avons    analysé    les    différentes    techniques    de  regroupements  de  nuages.  Ce  regroupement  consiste  en  la  fusion  des  différentes stations de lever dans un seul et même  projet. Pour cela deux  techniques  sont  envisageables (d’autres  méthodes  peuvent  être  utilisées  mais  ne  sont  pas  adaptées  aux  auscultations  d’ouvrages  en  terre)  :  le  regroupement « nuage par nuage » qui permet de regr  ouper les nuages de  points en fonction de leurs géométries et le regroupement par cibles qui  se  base  sur  la  mesure  des  références  positionnées  sur  le  terrain.  Ces  deux techniques nous ont fourni des résultats différents, c’est-à-dire une                                                               
précision de regroupement de l’ordre de 5 mm pour la méthode se basant sur les cibles contre 6 mm  pour la technique de consolidation nuage par nuage. 
Par ailleurs, lors de ces opérations de consolidation nous avons constaté des dédoublements  de points, comme nous le montre la figure 6, qui semblent être essentiellement dus à des problèmes  de mesures lors des opérations de terrain. Toutefois, ces phénomènes sont moins importants pour le  regroupement à base de cibles, ce qui nous laisse penser que cette méthode est la plus adéquate lors  d’auscultations d’ouvrages en terre.

6.    Etude de la précision des instruments

Afin  d’analyser  la  précision  des  lasers  scanners,  nous  avons  effectué  différents  tests permettant de confronter la lasergrammétrie aux techniques de levers classiques par  intersections spatiales. Ainsi, deux ouvrages en terre (un déblai et un remblai ferroviaire)  situés  sur  la  ligne  Montauban  –  Les  Aubrais  ont  été  auscultés  à  l’aide  de  cette  nouvelle  technologie.   Chacun   de   ces   ouvrages   est   équipé   de   points   de   contrôle   qui   sont  matérialisés par des pointes (cf. figure 7).

                                                                                                                           
Les  mesures  ont  été  réalisées  à  l’aide  de  deux  méthodes  différentes :  la  méthode   du   centrage   forcé   à   l’aide   du   Trimble   GX   et   l’utilisation   de   l’outil  « resection » lors du lever avec le Leica HDS 3000.           
Nous avons alors scanné avec précision les pointes(avec un pas de mesure compris entre 1 mm et 3  mm à 100 mètres) afin de pouvoir déterminer les coordonnées du sommet.
Dans un souci de recherche de la méthode présentant le meilleur rapport qualité / prix, nous  avons effectué le traitement des coordonnées des pointes (mesurées à l’aide de l’instrument Leica) de  deux manières différentes : 

  1. Mesure directe sur le nuage de points comme le présente la figure 8.
  2. Mesure  des  coordonnées  après  modélisation  de  la  pointe.  Cette  modélisation  a  été  effectuée  à  l’aide  d’un  cylindre.  En  effet,  le  cylindre  et  le  cône  étant  parfaitement  coaxiaux nous pouvons constater que la pointe s’inscrit dans un cylindre (Cf. figure 9).

Cylindre  modélisé     

Figure 8 : Mesure directe sur le nuage de points

Point mesuré

Figure 9 :  Modélisation d’une pointe

Ces  deux  méthodes  nous  ont  fourni  des  résultats  sensiblement  similaires  soit  ±  8  mm  en  planimétrie et ± 9 mm en altimétrie pour la mesure directe contre ± 9 mm en altimétrie et planimétrie  pour la modélisation. Ceci nous permet de penser que la mesure directe représente le meilleur rapport  qualité prix car la modélisation des objets entraîne la mise en place de traitements longs et fastidieux  qui ne permettent pas d’améliorer la qualité des mesures.
Nous  avons  ensuite  comparé  les  différents  scanners utilisés  aux  techniques  d’auscultations  actuelles. Les coordonnées des pointes ont bien évidemment servi de comparaison. Nous avons alors  obtenu les résultats suivants : 

  1. Trimble : Ecart type planimétrique ± 6 mm et écart type altimétrique ± 8 mm.
  2. Leica : Ecart type planimétrique ± 8 mm et écart type altimétrique ± 9 mm

Les résultats  présentés ci-dessus ne peuvent être atteints que  lors de  l’utilisation  du  pas  le  plus fin de mesure fourni par l’instrument.
Nous pouvons observer que les instruments ont une précision quasiment identique qui est de  l’ordre du centimètre. Cette précision semble être suffisante pour l’auscultation d’ouvrages en terre car  les mouvements significatifs de ce genre d’ouvrages sont de l’ordre de ± 2 à 3 cm. 
Par   ailleurs,   l’analyse   des   données   et   des   distances   mesurées   nous   montre   qu’il   est  préférable de travailler dans une plage de distance de 0 à 50 mètres. En effet, à partir de 50 mètres  les  dérives  angulaires  et  en  distance  deviennent  très  importantes  (environ  6  mm  à  100  m).  Par  conséquent, les mesures pour des distances supérieures à 100 m sont à proscrire.

7.    Documents réalisables

Une  fois  l’analyse  des  précisions  instrumentales  effectuée,  nous  avons  étudié  les  différents  traitements des nuages de points réalisables. Ainsi, nous avons pu constater qu’il est aisé de dessiner  des profils en long, des profils en travers ainsi que de calculer des cubatures en n’importe quel point  du nuage. Par ailleurs, il est possible de modéliser l’objet afin d’obtenir un modèle en trois dimensions.  Cet outil nous semble particulièrement intéressant car, par comparaison des différents modèles 3D,  nous  pourrons  effectuer  une  cartographie  d’erreur  présentant  les  mouvements  subis  par  l’ouvrage  ausculté.
Il semblerait que les suites logicielles fournies par les constructeurs ne soient pas à ce jour,  suffisamment développées. En effet, il nous est impossible de créer des profils (en long ou en travers)  de   la   même   manière   que   Covadis   par   exemple   (mise   en    place   d’un   plan   de   comparaison,  détermination  des  distances  partielles  et  cumulées…).  Nous  pouvons  tout  de  même  penser  que  ce  problème,  qui  est  certainement  dû  à  la  nouveauté  des  systèmes,  va  être  corrigé  dans  un  avenir  proche.

8.    Conclusion

Ce  projet  nous  a  permis  de  tester  et  de  découvrir  une  nouvelle  méthode  d’auscultation  d’ouvrages  en  terre  qui  pourra,  peut  être,  révolutionner  les  techniques  de  suivis.  La  capacité  des  instruments à mesurer une grande quantité de points dans un laps de temps réduit nous permet de  réaliser des levers exhaustifs des différents objets scannés.
Néanmoins, cette méthode d’auscultation ne doit pas faire disparaître les techniques actuelles  (Suivis par nivellement, par tachéométrie et par GPS). En effet, la précision des lasers scanners ne  nous permet de mesurer que des mouvements centimétriques tandis que les méthodes traditionnelles  sont capables de détecter des mouvements de quelques millimètres.
Cette étude nous permet de conclure qu’il est préférable voire indispensable de coupler les  différentes  techniques  lors  de  l’auscultation  d’un ouvrage  naturel.  De  cette  manière,  à  l’aide  du  scanner  laser  nous  pourrons  déterminer  les  zones  à risques  qui  devront  être  équipées  de  points  topographiques à ausculter par méthode classique. Ainsi, nous développerons notre connaissance du  terrain et nous pourrons présenter au client un suivi plus accompli qu’actuellement. 
Cette amélioration de la qualité des suivis va entraîner un coût de mesure supplémentaire. Ce  surplus  financier  doit  tout  de  même  être  rapporté  à    la  possibilité  d’amélioration  de  la  sécurité  ferroviaire.

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