Journées de la Topographie
du 2 au 4 octobre 2006

Rémy BOUILLAGUET

MESURE DE SURFACE DE LA MER PAR GPS CINEMATIQUE : 
METHODOLOGIE ET PRECISION / EXACTITUDE

 

Société d’accueil :                         LAREG (IGN)
PFE présenté par :                        Rémy BOUILLAGUET
Directeur (directrice) du PFE :    Marie-Noëlle BOUIN 
Correcteurs :                                 M. FERHAT
M. BONNEFOND

Introduction

L'archipel du Vanuatu dans le Sud-Ouest du Pacifique intéresse de nombreux scientifiques de 
part ses caractéristiques géodynamiques: activité tectonique et volcanique, fortes variations spatiales  de la bathymétrie, … Pour caractériser les déplacements verticaux du fond, l'équipe du LAREG et de  l'IPGP (Institut de Physique de Globe de Paris) suit l'évolution du niveau des mers autour de l'île de  Santo  située  dans  l'archipel.  Dans  cette  optique,  il  a  été  décidé  d'effectuer  des  mesures  avec  la  technique   GPS   bien   que   la   zone   soit   couverte   par   des   données   d'altimétrie.   Après   plusieurs  campagnes  de  mesure,  l'objectif  est  à  présent  de  caractériser  la  précision  des  mesures  GPS  cinématiques en mer. On s'attend à des ordres de précision différents suivant la zone de levé, l'étatde  la  mer,  la  longueur  de  la  ligne  de  base,  …  Il  s'agi ra  donc  dans  un  deuxième  temps  de  mettre  en  évidence les sources d'erreur et de caractériser leur influence sur la qualité des résultats.

1.   Présentation d'une campagne de levé

L'équipe  du  projet  a  réalisé  plusieurs  campagnes  de  mesure  GPS:  une  première  en  2003  (résultats de  qualité moyenne), une deuxième en 2004 et une troisième session au début de  2006.  Les observations GPS se font à la fois sur un bateau et sur une bouée avec des objectifs différents: la  bouée est placée au mouillage au-dessus des marégraphes pour des mesures locales tandis que le  bateau navigue dans plusieurs zones (baie, près des côtes, plus au large, …). La figure 1 présente la  géographie du lieu et l'itinéraire du bateau lors de la campagne 2004. Les cercles rouges illustrent la  position des marégraphes et les verts, à terre, représentent les stations GPS de référence.

2.   Correction des données GPS

Avant de caractériser la précision du système GPS en mer, il est indispensable de s'affranchir  des  différents  paramètres  propres  au  milieu  maritime  et  perturbant  la  mesure.  Cette  correction  des  hauteurs mesurées par GPS est réalisable grâce aux  nombreuses données que nous possédons sur  la zone. Tout d'abord, il s'agit de s'affranchir des variations de marée à l'aide des données fournies  par les marégraphes. Cette opération élimine en partie les variations à grande échelle, principalement  diurnes et semi-diurnes, caractéristiques de l'évolution de la marée. De plus, les hauteurs déterminées  par GPS cinématique sont entachées de la pente de la surface moyenne qui peut être relativement  importante  dans  certaines  zones  (jusqu'à  10  cm  pour  une  distance  de  1  km).  Pour  réduire  son  influence, nous utilisons les données d'altimétrie (Topex/Poséidon) qui sont affectées de la pente du  géoïde  de  la  même  manière  que  les  données  GPS.  La  différence  entre  les  hauteurs  GPS  et  T/P  permet effectivement de diminuer l'impact de ce paramètre (figure 2).

Si on fait la différence entre les 2 hauteurs,  on s’aperçoit que la série varie moins dans
le cas de la différence (graphe du bas) que  pour les simples mesures GPS (haut).
On  a  donc  en  théorie  supprimé  l’influence  de   la   pente   du   géoïde.   Cela   se   vérifie
surtout au début et à la fin de la série.
Ecart-type sur l'ensemble de la série de Sabine: 
- Données corrigées de la marée:  s # 1,250 m  - Résidus GPS - T/P: s # 0,461 m

Figure 2: Comparaison avant et après corrections des hauteurs T/P. Cas de la zone de Sabine.

Les deux premières corrections servent essentiellement à  limiter l'influence des variations à  grande  échelle;  l'imprécision  au  niveau  local  ne  diminuant  pas.  Ce  constat  s'appuie  sur  l'étude  des  séries  temporelles  de  hauteurs  avec  la  méthode  de  la  moyenne  glissante.  Nous  pouvons  ainsi  déterminer  la  précision  sur  de  petits  échantillons(120s  dans  notre  cas)  et  comparer  son  évolution  après chaque correction. Finalement, pour réduire l'imprécision locale, nous employons les données  d'attitude  provenant  de  la  MRU  (Motion  Reference  Unit)  du  bateau.  Puisqu'elles  mesurent  les  mouvements du navire, il nous est possible de connaître les variations de hauteur dues à l'état de la  mer,  et  donc  de  s'en  affranchir  en  les  retranchant  aux  hauteurs  mesurées  par  l'antenne  GPS.  La  précision locale des mesures s'améliore effectivement après cette dernière correction.
Les différentes corrections ont été appliquées auxdonnées GPS de 2004 et de 2006 avec des  conséquences équivalentes pour les deux campagnes de levé; La majeure partie de la dispersion des  hauteurs GPS est le fait des mouvements de l'antenne dus aux variations de la mer.

3.   Les différentes sources d'erreur et d'imprécision

Les erreurs GPS
Les principales sources d'erreur inhérentes au système GPS sont la longueur de la ligne de  base et les coupures dans les données. Pour le premier paramètre, son influence sur la qualité des mesures devient trop forte à partir d'une distance de 50 km entre la référence et le mobile. Concernant  les pertes de signal, un post-traitement approprié permet de limiter leur impact.

L'état de la mer
Les  corrections  sur  les  données  GPS  ont  permis  de  mettre  en  évidence  l'influence  de  ce  paramètre illustrée par la figure 3.

On compare :
Les données uniquement corrigées   de la marée. En bleu.
Et ces mêmes données auxquelles 
on     a     retiré     d’une     part     les     hauteurs  ellipsoïdales déterminées par le satellite T/P
(pour  s’affranchir  de  la  pente  du  géoïde)  et  d’autre    part    les    variations    de    la    mer
mesurées    par    la    centrale    d’attitude    du  bateau. En rouge.

Figure 3: Comparaison des écarts-types "glissants"avant et après correction de la MRU à Wusi

Remarque:  Les  ordonnées  sont  les  valeurs  d'écart-type  pour chaque  intervalle  de  la  moyenne  glissante (120 s). Elles représentent donc la dispersion locale des mesures.

Vitesse/accélération du bateau
Plus  que  la  vitesse,  ce  sont  les  accélérations  (ou décélérations)  importantes  du  bateau  qui  provoquent  dans  la  plupart  des  cas  une  plus  grande  dispersion  des  mesures  GPS:  hauteurs  plus  irrégulières.  Au  contraire,  une  vitesse  uniforme  est  synonyme  d'une  faible  dispersion  des  résultats.  Par ailleurs, la vitesse influence l'enfoncement du bateau et donc l'exactitude des mesures de hauteur.

Le post-traitement
La  qualité  du  post-traitement  cinématique  est  primordiale  pour  une  bonne  précision  des  résultats.  Nous  avons  ainsi  optimisé  le  calcul  de  deux  logiciels  de  traitement  (Track  et  GrafNav)  à  l'aide  de  tests.  Les  traitements  ont  été  réalisés  à  partir  des  données  de  2004  et  2006.  Après  la  comparaison entre les résultats issus de ces deux logiciels, il s'avère que GrafNav est le plus adapté à  notre  étude:  pertes  de  signal  mieux  gérées,  hauteurs  ellipsoïdales  moins  dispersées,  plus  grande  capacité de calcul et donc gain de temps, …

4.   Précision du levé GPS cinématique en mer

L'étude approfondie des résultats des campagnes 2004 et 2006 m'a permis de dégager une  précision relative à chaque type de zone géographique. Cette "classification" ne concerne cependant  que ce levé autour de l'archipel du Vanuatu et on ne peut garantir qu'elle s'applique à tout levé GPS  en mer.


 Situation de levé

Données GPS corrigées  de la marée

Données corrigées en +  des variations de la mer

 Dans une baie 

Autour de 5 cm, parfois -

< 5 cm

 Bateau au mouillage

10 - 15 cm

Autour de 5 cm

 Bateau loneant une côte

15 <   < 25 cm

5 <   < 15 cm

 Au large

20 <   < 30 cm

5 <   < 15 cm

Les ordres de précision donnés dans le tableau ci-dessus correspondent aux mesures GPS  du bateau.  Pour  la bouée, la précision des  hauteurs  n'est pas meilleure  que celle  des mesures sur  bateau lorsqu'il se situe au mouillage. Les données d'attitude (MRU) ne concernant évidemment pas  la bouée, l'apport de ces données est donc indéniable car elles permettent d'atteindre (pour le bateau)  une précision équivalente à celle de mesures GPS supposées plus stables spatialement (bouée).

Conclusion

L'étude   des   caractéristiques   géodynamiques   de   l'archipel   du   Vanuatu   nécessite   des  précisions  de  mesure  relativement  élevées  Les  hauteurs  brutes  déterminées  par  GPS  en  mer  ne  permettant pas d'atteindre de tels niveaux de précision, nous avons mis en place une méthodologie  de correction des résultats; la plus significative pour l'amélioration de la précision étant la correction  de l'état de la mer. Après ces opérations, nous parvenons à des précision intéressantes: moins de 5  cm en zone calme et entre 5 et 15 cm plus au large. Les mesures altimétriques étant impossibles trop  près des côtes, le levé GPS sur bateau apparaît donc comme une solution pour faire la liaison entre  marégraphe et trace de satellite.
Il  reste  néanmoins  à  s'assurer  que  les  résultats  GPS  de  surface  moyenne,  en  plus  d'être  relativement précis, sont exacts. Une des méthodes envisageables consiste à comparer les hauteurs  GPS corrigées pour les deux campagnes de  levé (2004 et 2006) avec un logiciel de création et  de  représentation de surfaces (GMT par exemple). En cas de bonne corrélation, une comparaison avec  les hauteurs déterminées par altimétrie apporterait la confirmation de l'exactitude des résultats GPS.

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